[Poésie] Orneval

Seigneur S. de C. a écrit:: Dans une froide combe, où la brume s'élève ;
L'ombre de la nuit tombe, et voile les sous-bois.
Entre les troncs serrés, on peut entendre un pas,
Et presque deviner, un animal, un rêve.

Sa silhouette rapide, explore les taillis.
Par un saut intrépide, il saute les fossés.
Le cerf va bondissant, de ses bois couronné ;
Sur son pelage blanc, une rosée scintille.

Toujours il a régné, en ces tendres vallons.
Lui le roi des forêts, il fuit comme la nuit.
Sa chevauchée l'entraine, entre les arbres gris.
Il court à perdre haleine, écarte les buissons.

Il connaissait chaque arbre, aimait chaque clairière.
Il en pleurait trop tard, brisé par les saignées.
Il n'avait point souffert, des flèches acérées.
Mais le deuil de sa terre, était bien trop amère.

Sur son triste sillon, les combes clairsemées,
Ne portaient plus de fruits, et perdaient leurs feuillages.
Des chênes moribonds, aux bras noueux sans âges,
Attendaient sur leurs troncs, le fer de la cognée.

A chaque instant il voit, ses bosquets qui se meurent.
Il ne sait pas de quoi, l'avenir sera fait ;
Il a déjà choisi, entre plaine et forêt.
Son esprit trop meurtri, gémit, sanglote, pleurt.

Alors se retournant, il revient sur ses pas ;
Ses sabots vieillissants, mais la démarche fière.
Il vient se rapprocher, de la froide lisière ;
Aux abords du sentier, un pisteur l'aperçoit.

Le cerf ferme les yeux, détournant le regard.
Il reste silencieux, à deux pas du chasseur.
Le canon du fusil, est braqué sur son coeur...
Un coup de feu jaillit, vibrant dans l'air du soir.

» [Poésie] Histoire de Krak le Nain